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L'hivernage de 2021 s’est caractérisé par une mauvaise répartition spatiale et temporelle des pluies couplée à un déficit pluviométrique accru dans le pays (Figure I). Les cumuls pluviométriques en fin du mois de septembre 2021 comparée à la même période de l’année 2020 indiquent une situation déficitaire dans 81 pour cent des postes (OSA, Novembre 2021).
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Le mauvais déroulement de la saison de croissance des cultures entraînera très probablement une diminution des rendements agricoles ainsi que des impacts négatifs sur la situation de la sécurité alimentaire ainsi que sur les moyens d’existence des ménages au niveau des zones pluviales, agropastorales, pastorales et les zones de la vallée du fleuves Sénégal.
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Les prévisions de la production nationale pour la campagne agricole 2021/2022 font état d’une baisse de la production brute de toutes spéculations confondues soit une de 4 pour cent comparé à la moyenne des cinq dernières années (2016/2017 à 2020/2021) et de 14 pour cent comparé à la campagne agricole de 2020/2021.
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Les prix de tous les produits agricoles sont en forte hausse sur les marchés par rapport à la moyenne de l’année dernière. Ceci s’explique autant par la baisse de la production agricole annuelle que par la hausse des prix des denrées alimentaires importées auxquelles les ménages pauvres et les plus pauvres ne peuvent accéder qu’après la vente de leur production agricole largement insuffisante pour couvrir l’ensemble de leurs besoins alimentaires et nutritionnels.
La Mauritanie a connu une campagne agricole très rude cette année, marqué par un important déficit pluviométrique et une mauvaise répartition spatiale et temporelle des pluies avec de longues périodes de séquences sèches. Ceci a entraîné une répercussion très négative sur les rendements agricoles, les conditions agropastorales, les revenus et les actifs des populations pauvres et très pauvres et par conséquent sur leur situation alimentaire et nutritionnelle au niveau des zones de cultures de pluies, agropastorales, pastorales et nomadismes.
La production agricole : Les zones pluviales et agropastorales principalement dans le Dieri (quelque surface non sujette à inondation et cultivée sous pluie) sont les plus affectées à cause des retards de semis et des re-semis du a l’apparition des séquences sèches au niveau de l’ensemble des zones agricoles, la situation est plus que préoccupante du fait de la baisse relative des superficies mises en valeur. Le niveau de production attendu sera en dessous de la moyenne par rapport à l’année 2020 et à la moyenne des cinq dernières années dans la plupart des zones. Pourtant dans les bandes sud du pays, elle restera encore plus faible par la faiblesse des pluies. Pour les cultures de décrue, même si le taux de remplissage des retenus d’eau est jugé sensiblement moyen, les espoirs de récoltes restent de loin inférieures à ceux d’une année normale. En effet, la faible crue du fleuve Sénégal ainsi que du Walo et le faible taux de remplissage des barrages et des bas-fonds diminuera substantiellement les mises en valeur des terres pour les cultures de décrue. Les prévisions de production font état d’une production brute pour la campagne agricole 2021/2022, de 349.189 tonnes, toutes spéculations confondues contre 363.069 tonnes pour la moyenne des cinq dernières années et 409.922 tonnes en 2020/2021 ; soit respectivement une baisse de 4 et 14 pour cent (Commissariat à la Sécurité Alimentaire (CSA), Direction de l’Observatoire de la Sécurité Alimentaire (OSA), Novembre 2021).
Les zones pastorales : Très tributaire des conditions pluviométriques, la situation pastorale est très déficitaire dû au mauvais développement des pâturages durant la saison des pluies dans la majorité des zones des moyens d’existence excepté dans les bandes frontalières avec le Mali et le Sénégal, où le pâturage a connu un bon développement. Toutefois, ces zones relativement bien pourvues connaissent une surcharge de transhumants provenant du Mali et du Sénégal épuisant lourdement ce potentiel. Les transhumances internes sont moindres en cette période par manque de superficies disposant de pâturages suffisants et le recours à l’aliment de bétail est déjà observé dans des zones déficitaires du nord des deux Hodhs, de l’Assaba, du Brakna, du Trarza du Gorgol et du Tagant ainsi que dans les régions du nord du pays ou la situation est particulièrement difficile pour la seconde année consécutive.
Les marchés à bétail : Les marchés de bétail de l’intérieur du pays et principalement ceux du centre et de l’ouest de la zone agropastorale ainsi que ceux des zones pastorales et de la vallée du fleuve Sénégal sont bien approvisionnés. En année typique, en pareille période post récolte où les prix des produits agricoles sont au plus bas, les éleveurs procèdent à des ventes pour s’approvisionner en denrées alimentaire et produits non-alimentaires de premières nécessité. En prévision des difficiles conditions attendues (la longue et précoce période de soudure) et des pertes animales qui pourraient en découler, les ventes d’animaux seront plus importantes du fait de la hausse du prix des produits alimentaires (surtout produits importés), de la baisse des demandes des animaux sur les marchés. A cela s’ajoutent les mauvaises conditions pastorales dans la plus grande partie des zones à vocation pastorale qui incitent les éleveurs à procéder à un déstockage ventes stratégique. En effet, les éleveurs multiplient les ventes des femelles et des bêtes âgées plus vulnérables aux mauvaises conditions pastorales.
La demande interne en cheptel est actuellement inferieures à celle du mois passé et d’une année moyenne pour cause de faible demande en l’absence d’évènements et/ou de cérémonies officielles. En effet, à l’exception des demandes d’abattage dans les centres urbains, les éleveurs et les marchands de bétail, faute de pâturages, n’ont que cette source de revenue. La saturation des marchés de regroupement et la baisse de la demande ont également considérablement ralenti les flux internes, qui fonctionnent au rythme des demandes maliennes et sénégalaises, exception faite des classiques exportations vers les pays côtiers qui fonctionnent comme en une année moyenne.
Les marchés et des prix des produits alimentaires : L’inflation continue dans tous les marchés formels, les prix des denrées alimentaires sont en constante hausse (Figure 2). En dépit de la régularité de l’approvisionnement, les difficultés d’accès aux produits alimentaires de base par les populations pauvres et très pauvres persistent toujours et pourraient s’amplifier en période de soudure.
Les flux d’approvisionnements internes et externes en denrée alimentaire sont réguliers et suffisants avec la reprise des flux transfrontaliers portant surtout sur le sorgho, le mil et les riz local du Sénégal et du Mali. La demande est supérieure à la moyenne dans l’ensemble des zones de moyens d’existence du pays du au faible rendement agricole et aux mauvaises conditions de pâturage. Avec la présence et le fonctionnement des boutiques EMEL du gouvernement tout comme celles du patronat, ayant des prix plus bas que ceux pratiqués sur les marchés, la demande est plus faible des marchés dans les centres urbains et notamment dans la ville de Nouakchott.
Comme c'est typique pour cette période de l'année, les flux en provenance de Nouakchott et en direction des marchés de l’intérieur du pays sont de plus en plus dynamiques. En effet avec la forte baisse des productions céréalières pluviales locales, la demande sur les céréales importées de substitution se fait de plus en plus forte. De même, les flux entre le sud de la zone de cultures pluviales et les marchés nationaux connaissent une intensification.
Les prix de tous les produits agricoles sont en forte hausse tant par rapport à novembre que par rapport à la même période d’une année moyenne (Figures 2a et 2b). Ceci s’explique autant par la baisse de la production agricole annuelle que par la hausse des prix des denrées alimentaires importées auxquelles les ménages pauvres et les plus pauvres ne peuvent accéder qu’après la vente de leur production agricole largement insuffisante. Au marché d’Adel Bagrou, marché de référence de la zone des cultures pluviales où les productions agricoles sont les meilleures du pays, le prix d’un sac de 100 Kg de mil (céréale de base de l’alimentation des ménages) qui, à pareille période d’une année moyenne, se vendait à moins de 1200 MRU, tourne actuellement autour de 1900 MRU.
Dans toutes les zones de moyens d’existence les revenus saisonniers des ménages pauvres et les plus pauvres sont nettement inférieurs à ceux d’une année normale moyenne et les deux périodes de soudures (agricole et pastorale). Avec la fin des récoltes dans les zones de cultures pluviales, agropastorales et dans la vallée du fleuve Sénégal, les ménages pauvres et les plus pauvres perdent leur principale source de revenus saisonniers. L’afflux de la main d’œuvre dans ces zones de cultures, devrait, entrainer une baisse du temps de travail et de donc de revenus comparativement à une année typique. En cette période de saison sèche dans les autres zones rurales seules les activistes informelles, l’exploitation minière et écologique (cueillette, bois, charbon, paille) rapportent encore de revenus aux ménages. Les zones urbaines sont marquées par une légère détérioration du pouvoir d’achat des ménages en raison de la baisse des opportunités de travail de main d’œuvre dans la construction, des activités de travail domestique et de la vente de nourriture et produit artisanaux. Dans toutes les zones de moyens le niveau des revenus saisonniers reste encore inférieur à celui d’une année moyenne.
Durant cette période de post-récoltes, la situation alimentaire et nutritionnelle des ménages pauvres et très pauvres est préoccupante du fait des effets combinés d’une production agricole faible, de la hausse des prix des denrées alimentaires de base, des retards des récoltes des cultures de contre-saison et du faible apport des activités pastorales. Cette situation devrait exposer d’avantages les ménages pauvres, surtout les plus vulnérables à une insécurité alimentaire nutritionnelle sévères. Les résultats du Cadre Harmonisé (CH) d’analyse et d’identification des zones à risque et des populations en insécurité alimentaire au Sahel et en Afrique de l’Ouest qui s’est tenu en novembre 2021 confirme cette tendance et souligne qu’au niveau national 6 Moughatas sont en phase minimale, 37 Moughatas sont en phase sous pression, et 5 Moughatas sont déjà en phase de crise en cette période. Il s’agit de M'Bout (Gorgol); Maghama (Gorgol); Monguel (Gorgol); Aioun (Hodh El Gharbi) ; Tintane (Hodh El Gharbi). La population en insécurité alimentaire est estimée en situation courante (octobre-décembre 2021) à 384.268 personnes contre 660.740 personnes en situation projetées (juin-août 2022) réparties entre : 3 moughatas seront en phase minimale (Phase 1 de l’IPC), 12 en phase sous pression (Phase 2 de l’IPC) et 33 moughatas en phase de crises (Phase 3 de l’IPC).
ZONE | ANOMALIES ACTUELLES | ANOMALIES PROJETÉES |
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Nationale | La production agricole annuelle prévisionnelle largement en dessous de la moyenne par rapport à l’année dernières et aux cinq dernières années soit une baisse de 4 et 14 pourcents respectivement. | La faiblesse des activités agricoles et génératrices de revenus fait que les ménages dépendent largement des marchés pour l’accès à la nourriture avec un faible pourvoir d’achat, et cette dépendance devra se poursuivre jusqu’aux récoltes des cultures de contre-saison. |
Une disponibilité de ressources et des productions pastorales inférieures à la moyenne contraignant les éleveurs à l’adoption de stratégies atypiques de vente de bétails et de déstockage. | Les périodes de soudure pastorale et agricole seront plus précoces et longues ainsi que les mouvements de transhumance et l’exode de mains d’œuvre vers les régions du sud et vers les pays voisins seront plus importants. | |
Une baisse généralisée des revenus ainsi que du pouvoir d’achat des ménages pauvres et très pauvres dans toutes les zones de moyens d’existence. | Avec les déficits pluviométriques, es prochaines récoltes annuelles des cultures de contre saison devraient connaitre une baisse relative par rapport à la moyenne à cause du faible niveau de remplissage des retenues d’eau. | |
Une hausse continuelle des prix des denrées alimentaires de base au-dessus de la moyenne quinquennale, en particulier pour les produits importés. |
La normalisation des flux externes et internes, l’approvisionnement en denrées de première nécessité ainsi que la reprise des transactions financières et des flux de marchandises avec les pays frontaliers et les pays d’Europe et d’Asie se précisent et devraient s’intensifier à partir de janvier/février 2022. Les prix des denrées alimentaires de premières nécessités, qui sont soumis à une inflation depuis le début de l’année 2021, commenceront à se stabiliser.
Les cultures de contre saison dans les espaces de cultures des bas-fonds et des espaces irriguées sont en stage de montaison et d’épiaison et n’ont pas eu les niveaux de crues souhaités en raison des mauvaises conditions pluviométriques. Les prochaines récoltes des cultures, les bas-fonds et les espaces irrigués s’annoncent en dessous de la moyenne comparativement à une année normale.
Actuellement, les ménages pauvres et très pauvres des zones de cultures pluviales vivre difficilement de leurs propres productions largement insuffisantes, des ressources pastorales legerement disponibles et des revenus des transferts des migrants permanents, malgré la baisse des revenus issus du travail agricole et le déstockage préventif. Cette tendance sera probablement accentuée durant les périodes de soudure.
Les zones de nomadisme pastoral et minière, se caractériseront par une légère dégradation du pouvoir d’achat des ménages avec la détérioration du revenu tiré de la vente du bétail et de opportunités de travail d’entretien du bétail, et de main d’œuvre locale de construction et domestique. Les mauvaises campagnes agropastorales successives dans certaines régions concernées aggravent la situation actuelle pour ces ménages pauvres et très pauvres.
Dans les zones pastorales, les Oasis et Oued, on assistera à une dégradation du pouvoir d’achat des ménages du fait de la diminution de la production agricole (datte et niébé), de celle du lait, ainsi que le manque d’opportunités de travail local. Les ménages très pauvres feront probablement face à une phase d’insécurité alimentaire en Crise (Phase 3 de l’IPC) durant toute la durée de la période de soudure.
Dans les zones de cultures fluviales et de la vallée du fleuve Sénégal affectées par une baisse significative de la production et la faiblesse des opportunités d’activités locales on assistera à une dégradation du pouvoir d’achat des ménages très pauvres ainsi que de leur situation alimentaire et nutritionnelle en période de soudure (avril-mai) et jusqu’en septembre 2022. Les ménages pauvres et très pauvres de ces zones feront probablement face à une insécurité alimentaire sévère (Phase 2 IPC) jusqu’en mai 2022.
Source : USGS/EROS
Source : FEWS NET
Source : FEWS NET
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