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Contrairement au répit généralement observé pendant la saison des pluies, on constate plutôt une augmentation des incidents et fatalités depuis le mois de mai, surtout dans les zones du nord et de l’est, accélérant ainsi la dégradation des moyens d’existence et perturbant le fonctionnement normal des marchés. Même en période de récoltes, les PDI et ménages hôtes dans ces zones resteront exposés à l’insécurité alimentaire aigue Crise (Phase 3 de l’IPC) jusqu’en janvier 2022.
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Nonobstant le déroulement assez normal de la saison des pluies, la réduction des superficies dans la moitié nord et est du pays et les baisses de rendements attendues dans certaines localités du fait de l’enherbement des champs ou des dégâts dus aux inondations, pourraient maintenir les productions agricoles nationales similaires à la moyenne quinquennale.
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Avec des stocks commerçants en dessous de la moyenne, il est probable que les tensions pour les reconstitutions soient plus fortes et plus longues en période de récoltes et post récoltes. En conséquence, les prix des céréales resteront au-dessus de leurs moyennes saisonnières. Les mesures restrictives liées à la pandémie de COVID-19 pourraient continuer de limiter les importations de certaines denrées de grande consommation avec pour conséquence des hausses atypiques de prix et une dégradation du pouvoir d’achat des ménages.
La saison des pluies s’est installée précocement ou à temps dans le pays suivant les prévisions saisonnières. Les mois de juin et de juillet ont enregistré des épisodes de séquences sèches dépassant 10 jours localement dans les régions dans les régions du Sahel, de la Boucle du Mouhoun, des Cascades, du Centre-Est et de l’Est. Cela a retardé les semis dans ces zones et retarde aussi le calendrier d’entretien des cultures au mois d’aout, période non propice du fait de la régularité des pluies et de la baisse de l’ensoleillement. D’où l’enherbement des champs de basfonds dans certaines localités. A la date du 20 aout, les cumuls pluviométriques saisonniers restent excédentaires à similaires sur la majeure partie du pays. Cependant, des déficits légers à modérés dans le nord comparativement à la moyenne (Figure 1) sont enregistrées. Toutefois, ces déficits pluviométriques n’ont pas affecté significativement le développement normal des cultures dont le stade dominant est le tallage-montaison pour les céréales et la ramification pour les légumineuses et le cotonnier. Depuis le début de la saison, des attaques de chenille légionnaire et autres ennemis de culture ont été observées sur un total de 21577 ha (Direction générales des productions végétales) et principalement sur les cultures de maïs surtout dans les régions du sud. Toutefois, des traitements ont été effectués et la situation phytosanitaire est globalement calme. Le soutien en intrants du gouvernement est similaire à la moyenne (33000 tonnes d’engrais, 4000 tonnes de semence). Cependant, des retards ont été constaté dans la distribution dans toutes les régions.
Les groupes armés djihadises continuent d’exercer des pillages et de proférer des menaces de représailles sur les populations civiles, surtout dans les localités frontalières. Au lieu d'un répit généralement observé pendant la saison des pluies, le deuxième trimestre de 2021 a vu plus d'incidents de sécurité dans le nord et l'est du Burkina Faso que les quatre mois précédents et la même période en 2020 (ACLED). Les mois passés ont été marqués par certaines des attaques les plus meurtrières signalées depuis le début du conflit. Notamment, les 4 et 5 juin, des djihadistes ont attaqué le village de Solhan (province de Yagha, région du Sahel), tuant 160 personnes. Le 18 août, des djihadistes ont attaqué un convoi de véhicules civils près du village de Boukouma entre Gorgadji et Arbinda (province du Soum, région du Sahel), tuant au moins 80 civils, 15 gendarmes et 6 volontaires pour la défense de la patrie (VDP).
Cela entraine des déplacements continues de populations qui sont contraints d’abandonner leurs moyens d’existences. Le cumul de PDI en fin juillet était de 1,368,164 (SP/CONASUR), soit une augmentation de 12% il y a trois mois. Les localités de la région du Centre-Est sont devenues zones d’accueil où les flux de PDI sont importants. En outre, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) a signalé la présence de quelque 11 000 demandeurs d'asile burkinabés au Niger voisin, soit une augmentation de 48 % par rapport au mois de janvier. Ainsi, malgré la bonne pluviométrie, les activités agricoles sont limitées, surtout dans les provinces frontalières des régions du nord (nord du Yatenga et du Loroum), du Sahel (Soum, Oudalan, Yagha) et de l’Est (toutes les communes frontaliers). Dans ces zones, la baisse de superficie pourrait varier entre 20 et 40%. Des baisses, mais inférieures à 20% pourraient également être enregistrées dans les provinces environnants (Kossi, Sourou, Bam, Sanmatenga, Namentenga, Comoé). Dans certaines zones de fortes présences de PDI, la pratique de cultures hautes (mil, sorgho et maïs) est interdite autour des villes et le long des routes principales, si bien que les producteurs sont contraints de se limiter à la culture de légumineuses.
L’approvisionnement des marchés en céréales demeure en-dessous de la moyenne et les prix maintiennent leur tendance à la hausse et au-dessus de la moyenne. Les baisses localisées de production enregistrées la saison écoulée dans les zones plus touchées par l’insécurité, les sorties de céréales plus que normal vers le Niger enregistrées avant la restriction du gouvernement, les achats accrus des brasseries et unités de transformation d’aliments pour volaille sur le marché local et la baisse atypique des flux entrant habituellement des pays côtiers en sont les principaux facteurs. En plus de la demande saisonnière typique des ménages dans les zones moins touchées par l’insécurité, il y a une demande plus importante pour les personnes déplacées internes (PDI) qui bénéficient de transferts monétaires des acteurs humanitaires. Le gouvernement est entrain de renforcer la vente de céréales à prix subventionné (6000 F CFA le sac de 50kg) dans 208 boutiques de vente à travers le pays. Cette opération qui a commencé en mars se poursuivra jusqu’en décembre 2021. Près de 41000 tonnes de céréales seront vendues pendant cette période. Cependant, l’impact de cette opération est peu visible sur le niveau des prix sur les marchés. Ainsi, en juillet, les prix des céréales de base restent élevés au niveau national par rapport à l’année passée : 39% pour le maïs, 12% pour le mil et 19% pour le sorgho. Comparativement à la moyenne quinquennale, les hausses sont de 28% pour le maïs, 9% pour le mil et 11% pour le sorgho. Des variations à la hausse entre 40 et 50% par rapport à la moyenne des cinq dernières années sont enregistrées particulièrement pour le maïs et sur les marchés frontaliers des zones de production.
La demande d’animaux, en particulier les petits ruminants est restée satisfaisante sur les principaux marchés de bétail grâce à la demande additionnelle pendant la fête de Tabaski passée. Les taux de vente des animaux présentés par jour de marché, en particulier les petits ruminants, ont atteint au moins 80% sur les marchés de Kaya, Dori, Gorom-Gorom et Djibo. En plus de la demande nationale, les principales destinations sont le Ghana et la Côte-d’Ivoire, avec cependant des flux à la baisse comparés à la moyenne et des couts de transport plus élevés que d’habitude du fait des frais illicites. Les prix de vente des petits ruminants sont supérieurs à la moyenne quinquennale. Par exemple, sur les marchés à bétail de Dori et de Djibo, les hausses sont de 42 et 17% pour les béliers respectivement et de 51 et 71% pour les boucs respectivement. Les termes de l’échange bétail/céréales sont à la faveur des éleveurs qui possèdent encore du bétail après les pertes et les déstockages enregistrés depuis le début de la crise sécuritaire. Quant au commerce des bovins, malgré l’amélioration des prix pendant la période de Tabaski, la demande notamment à l’exportation reste inférieure à la normale.
Depuis le mois de juillet, les stocks des produits importés et de grande consommation ont considérablement diminués auprès des commerçants. L’huile alimentaire produite localement (à partir des grains de coton) et importé principalement de la Côte-Ivoire (huile de palme) et de la Malaisie, connait des ruptures. Par rapport à la moyenne, le prix de l’huile enregistre une hausse de plus de 33%, celui du riz importé, une hausse d’environ 16%. Les prix du poisson et de la viande sont aussi en hausse de 17% chacun. Ces hausses affectent négativement le pouvoir d’achat des ménages et la qualité de la diète, surtout dans les centres urbains où ces produits sont plus consommés.
Face à l’épuisement typique de leurs stocks et à la hausse des prix des denrées de base, les ménages pauvres dans les zones relativement plus calmes changent leurs habitudes alimentaires en consommant des aliments moins préférés ou en augmentant la consommation de produits de cueillette et des légumes feuilles. Ils ont néanmoins accès au moins à deux repas par jour et vient en insécurité alimentaire aigue Minimale (Phase 1 de l’IPC). Dans le nord du pays, où les opportunités de revenus sont limitées du fait de l’insecurité et des pillages, les ménages proches des marchés principaux fonctionnels continuent déstocker leur cheptel pour acheter les denrées. Les PDI et ménages hôtes pauvres comptent avant tout sur l’assistance alimentaire. Celle-ci a été renforcée au cours de cette période de soudure. Les distributions alimentaires (cash et vivres) ont dû toucher 60% de la population dans le Soum et entre 25 et 30% des populations dans les provinces du Séno, du Loroum, du Ban, du Sanmatenga et du Namentenga. Elle contribue à y maintenir une insécurité alimentaire aigue Stress ! (Phase 2 ! de l’IPC). Par contre, en raison de l’augmentation des incidents sécuritaires qui affectent l’accès humanitaire difficile, la couverture est restée en dessous de 20% dans les provinces du Yatenga, du Yagha et de la Komondjari dans lesquels les PDI et ménages hôtes pauvres sont exposés à la Crise (Phase 3 de l’IPC). Malgré que 40% de la population dans l’Oudalan aurait bénéficié de l’assistance entre juin et juillet, l’afflux continue de PDI accroit les besoins (hausse de 11% du nombre de PDI en juillet comparé à avril). Par ailleurs, l’assistance est concentrée dans le chef-lieu de la province, mais est difficile à délivrer dans les communes situées le long de la frontière. Suite à l’érosion des moyens d’existence, les PDI et ménages pauvres hôtes accroissent les stratégies néfastes, notamment la mendicité et la réduction des quantités et du nombre de repas consommés. Cela les expose à l’insécurité alimentaire aigue Crise (Phase 3 ! de l’IPC).
La situation nutritionnelle des enfants de moins de cinq ans continue de se dégrader, en particulier dans les régions du Sahel et du Centre-Nord où les formations sanitaires fonctionnent au ralenti, voire sont fermées et où l’insecurité entrave la mise en œuvre des actions de prévention et de prise en charge la malnutrition. En effet, au second trimestre et comparativement au premier trimestre, les cas de MAS et de MAM ont augmenté de 6 et de 30% respectivement dans le Sahel et de 23 et 45% respectivement dans le Centre-Nord. Par rapport au second trimestre de l’année passée, les cas de MAS ont baissé de 17% dans le Sahel et de 11% dans le Centre-Nord. Par contre, on constate une augmentation des cas de MAM dans les deux régions : 19% dans le Sahel et 33% dans le Centre-Nord.
SUPPOSITIONS MISES À JOUR
- L’évolution du contexte national n’a pas fondamentalement changé les suppositions de FEWS NET pour le scénario le plus probable de la sécurité alimentaire et juin 2021 à janvier 2022, à l’exception des hypothèses mises à jour suivant.
- Au plan sécuritaire, contrairement au répit généralement observé pendant la saison des pluies, on constate plutôt une augmentation des incidents et fatalités depuis le mois de mai. Dans l'ensemble, les attaques perpétrées par des groupes militants contre les populations civiles devraient augmenter au moins jusqu'au début de 2022, pour atteindre les niveaux observés pendant la saison sèche de 2020 (janvier-mai) dans les régions de l'Est, du Nord, du Centre-Nord et du Sahel.
- La mise à jour des prévisions saisonnières indique une fin normale à précoce de la saison. Malgré le déroulement jusque-là satisfaisant de la saison, un arrêt précoce des pluies pourrait affecter négativement les rendements agricoles surtout dans les localités ayant enregistré des épisodes de séquences sèches. L’insécurité continue de perturber négativement les activités agropastorales. Il y a des améliorations dans l’accès aux champs dans la région du Centre-Nord du fait de la réduction des incidents. Par contre dans les zones frontalières du nord (provinces du Loroum, du Soum, de l’Oudalan et du Yagha), toutes les provinces de la région de l’Est) et les communes frontalières avec la Côte-d’Ivoire au sud, des réductions de superficies de 30 à 50% par rapport à la moyenne pourraient être observées. Dans l’ensemble, les réductions de superficies, les baisses de rendements suite à l’enherbement des champs et/ou à l’arrêt précoce des pluies et les risques d’inondations localisées, pourraient maintenir les productions agricoles nationales inferieures ou autour de la moyenne d’avant la crise sécuritaire.
- Par ailleurs, avec la recrudescence des variants de COVID-19, il est probable que des mesures de restriction se poursuivent dans les pays d’importation et entraver les échanges. Les ruptures de stocks de certains produits de grande consommation pourraient se poursuivre et la hausse de prix continuera à dégrader le pouvoir d’achat des ménages surtout dans les centres urbains.
PERSPECTIVE ESTIMÉE JUSQ’À JANVIER 2022
Comme en année normale, les récoltes en vert commencent à faire leur apparition dans la moitié sud du pays. La généralisation des récoltes à partir du mois d’octobre devrait permettre aux ménages de se maintenir en insécurité alimentaire aigue Minimale (Phase 1 de l’IPC), en particulier dans les régions moins touchées par l’insécurité. Dans le centre-nord et l’est du pays, il est probable que les récoltes des ménages pauvres ne puissent pas excéder trois mois de consommation. La limitation des mouvements et le manque d’opportunités de revenu maintiendront les moyens d’existence sous pression. De plus, l’assistance humanitaire qui dure seulement pendant la soudure diminuera en octobre. Les faibles niveaux de récoltes ne suffiront pas à compenser la perte de l'aide humanitaire dans la majorité des zones plus affectées par l’insécurité. Dans les provinces frontalières du nord et de l’est, notamment le Soum, l’Oudalan et le Yagha où plus de 20% des ménages n’ont pas eu accès aux champs pour la production, l’assistance alimentaire et le marché représenteront les principales sources de nourriture. L’érosion des avoirs limitera l’accès au marché et les PDI et ménages hôtes pauvres resteront confrontés à la Crise (Phase 3 de l’IPC) jusqu’en janvier 2022.

Source : FEWS NET
Cette mise à jour des perspectives sur la sécurité alimentaire présente une analyse des conditions actuelles d'insécurité alimentaire aiguë et de toute évolution de la dernière projection de FEWS NET concernant les résultats de l'insécurité alimentaire aiguë dans la géographie spécifiée au cours des six prochains mois. Pour en savoir plus sur le travail, cliquez ici.