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Depuis mars 2022, une résurgence de la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) dans le Rutshuru a occasionné des nouveaux déplacements en pleine période de reprise de la saison B. Selon OCHA, environ 102 000 personnes sont concernées par ces déplacements faisant baisser la participation aux activités agricoles et une production agricole estimée inférieure à la moyenne dans ce territoire difficile d’accès et où l’assistance alimentaire se fait de plus en plus rare.
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Depuis début mars 2022, on observe une hausse atypique des prix des denrées de base tant locales qu’importées du fait des faibles disponibilités sur les marchés locaux, qui s’expliquerait par l’augmentation des coûts de transport et la baisse du niveau d’importations de certains produits de base comme la farine de maïs et l’huile végétale raffinée. Cette tendance ponctuelle à la hausse semble se stabiliser aux deux premières semaines du mois d’avril et augure un renforcement du pouvoir d’achat des ménages.
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En ce début de la petite soudure (saison B), certaines zones de conflits au nord-est qui connaissent un déficit de consommation alimentaire resteront en situation de Crise (Phase 3 de l’IPC). En revanche, le centre-est et le sud-est, avec des territoires ayant connu une campagne agricole assez complète seront en situation de Stress (Phase 2 de l’IPC). Les zones stables du nord qui ne connaissent aucun déficit alimentaire seront en phase Minimale (Phase 1 de l’IPC).
Conflits et mouvements des populations : Depuis le 28 mars, des milliers de civils ont fui leurs villages dans le territoire de Rutshuru, à la suite des affrontements armés entre l'armée congolaise (FARDC) et combattants du groupe armé du Mouvement du 23 mars (M23) qui ont démarré dans plusieurs localités. Selon OCHA, ces affrontements ont fait 53 475 personnes nouvellement déplacées et anéanti les activités économiques sur cet axe principal reliant la RDC à l’Ouganda voisin. Par ailleurs, dans le territoire de Walikale, le conflit de contrôle des zones minières opposant les groupes armés a repris au cours de la première quinzaine du mois d’avril, qui s’est soldé par des enlèvements et arrestations arbitraires des opérateurs miniers, Cette situation perturbe les moyens d’existence des ménages vivants d’extraction artisanale des minerais dans cette zone.
Actuellement en Ituri, la situation sécuritaire dans les territoires de Djugu et Mahagi est restée tendue en ce mois d’avril, avec des attaques continues contre les civils malgré les opérations militaires en cours. La situation humanitaire a continué à se détériorer. Les miliciens CODECO ont poursuivi des attaques dans les villages et dans les sites des déplacés. En addition, les miliciens Zaïrois ont tendu des embuscades sur des routes et dans les villages tuants ainsi des dizaines des personnes. Dans le territoire d’Irumu, la situation sécuritaire semble s’améliorer du fait de l’arrivée des éléments UPDF dans la partie Sud d’Irumu. Depuis le mois de février, les UPDF ont bombardé les différentes positions ADF en pleine forêt dans la zone de santé de Boga, ce qui a occasionné la dispersion des ADF et leurs migrations vers le territoire de Mambasa. Cependant, dans la partie ouest de ce territoire, les miliciens FPIC ont poursuivi leurs exactions à l’egard des civils et des attaques sur les positions FARDC. 26 embuscades ont été tendues aux FARDC et aux usagers de la route dans l’objectif d’extorquer les biens et de se ravitailler en munitions. A Mambasa, il y a eu une résurgence de l'insécurité liée aux incursions des ADF qui seraient présumés associées aux Mai-Mai Mazembe. Le 08 février, 23 présumés ADF ont été tués par la coalition FARDC-UPDF dans les localités de Makusa et Makumo. Selon OCHA, La province de l’Ituri compte près de 1,9 millions de personnes déplacées internes.
Dans le Tanganyika, des violences ont éclaté au sud-ouest du Territoire de Kalemie à la suite de l’assassinat d’un chef de village sur l’axe Nyemba – Kasanga, en début du mois de mars, entraînant le déplacement de plus de 3 000 personnes selon OCHA. Les maisons abandonnées dans les milieux de provenance des personnes déplacées ont été pillées et incendiées, rendant difficile le retour des personnes déplacées. La commission mouvements des populations estiment environ 370 263 personnes déplacées internes dans le Tanganyika.
La situation des fertilisants en lien avec la crise en Ukraine : Selon la répartition des grands consommateurs d’engrais en provenance de la Russie et de l’Ukraine, on note que la RDC ne figure pas sur la liste des principaux pays africains importateurs d’engrais. Les conditions actuelles de la crise Ukrainienne ont conduit à un ralentissement dans la production des fertilisants. Au-delà de la production, figure la hausse globale du cout des produits pétroliers. Les perturbations de la chaîne d'approvisionnement et les coûts de transport élevés à la suite de l'imposition de restrictions à l'exportation et les fortes augmentations des taux de fret en vrac et en conteneurs causées par la pandémie de COVID-19 ont également exercé une pression à la hausse sur les prix des engrais.
Les exportations d'engrais par la Russie devraient également être légèrement à modérément réduites en raison de la réticence du secteur privé de traiter avec la Russie et réduit la capacité de transport maritime de la mer Noire. En plus des réductions potentielles de l'offre, la forte demande mondiale et la hausse des prix mondiaux de l'énergie exerceront une forte pression à la hausse sur prix des engrais en 2022. Par exemple, le cout de l’urée qui se négociait autour de 400$ par MT avant la crise (avril 2021), se vend aujourd’hui à près de 850 $ par MT (Janvier 2022), soit une hausse d’environ 112 pour cent.
Prix des denrées de base et fonctionnement des marchés : En début mars 2022, on a observé une volatilité des prix des certains produits avec une tendance à la hausse de l’ordre de 20 à 40 pour cent, notamment pour les produits alimentaires importés dont l’huile végétale et le riz. Quelques faits peuvent expliquer cette situation, notamment l’augmentation du prix de carburant d’environ 10 pourcents qui impacte significativement sur le coût de transport. On signale aussi les spéculations des commerçants sur la base des rumeurs d’une rupture probable des stocks en provenance de l’extérieur en lien avec la crise actuelle en Ukraine.
COVID-19 et restrictions : La situation épidémiologique de la pandémie COVID- 19 semble être maîtrisée avec des seuils de contamination de plus en plus bas, au fil des semaines. Face à cela, on assiste à un assouplissement des restrictions gouvernementales préjudiciables à certains moyens de subsistance, une situation qui améliore les disponibilités des vivres sur les marchés à travers l’ouverture des frontières avec certains pays voisins (Rwanda et Ouganda) et également les revenus des ménages et leurs accès à la nourriture.
Globalement, la situation actuelle n’a pas affecté les hypothèses émises dans le développement de scénario FEWS NET le plus probable pour la période de février à septembre 2022. Un examen complet du scénario est disponible dans le rapport des perspectives de la sécurité alimentaire de février 2022
Les révisions des quelques hypothèses utilisées pour développer le scénario le plus probable de FEWS NET ont été revues comme suit :
- Conflits et mouvement des populations dans l’Ituri, le Nord-Kivu et le Sud-Kivu :
- Dans l’Ituri : Malgré la diminution de la violence du pic de 2021 aux trois premiers mois de 2022, la violence à Irumu et Djugu - les principales zones d'opérations des militants du CODECO – continuera de provoquer des déplacements de population et devrait continuer d'augmenter tout au long de la période considérée, dépassant probablement les niveaux observés en 2021.
- Au Nord-Kivu : On s'attend à ce que les ADF conservent une présence plus réduite dans le Nord-Kivu au cours des prochains mois et continuent à mener des attaques, mais probablement à un niveau considérablement réduit par rapport à celui d'avant l’état de siège. En lien avec la crise dans le Rutshuru, il est probable que le M23 augmentera le rythme des attaques contre les communautés rurales du territoire de Rutshuru jusqu'en juillet 2022 au moins, entraînant de nouveaux déplacements de population.
- Au Sud-Kivu : Au regard de l’évolution de la situation sécuritaire dans cette province, il est probable que le nombre d'incidents et de décès associés se poursuivront à des niveaux plus élevés que récemment alors que les FARDC et Les forces burundaises poursuivent leurs opérations offensives.
- Dans les autres zones des conflits : où l’intensité de conflit est restée similaire aux deux derniers mois et continue à perturber les moyens d’existence des populations dans les provinces du Sud-Kivu, Kasaï, Kasaï Central, Maniema et Tanganyika, notamment en cette période de reprise agricole, la situation sécuritaire restera au statu quo durant le reste de la période de scenario avec des défis importants sur la reprise de la saison agricole en cours.
- La situation des fertilisants en lien avec la crise en Ukraine : Bien que la RDC ne soit pas citée parmi les grands consommateurs des fertilisants selon l’analyse de FEWS NET sur l’Ukraine, qui stipule une baisse probable au niveau global de l’ordre de 60%, la production de certaines denrées de base parmi les céréales (mais et riz) se fera à un cout plus élevé qui limiterait donc la capacité des ménages à produire normalement avec des rendements en baisse. Cette situation conduirait à la baisse des disponibilités aussi bien pour les produits locaux que ceux importés., Les prix des engrais devraient rester à des niveaux élevés (AMIS et BM). Selon ce scénario, les prix des engrais pourraient augmenter de 40 %, avec une pression à la hausse particulière sur les prix de la potasse, la Biélorussie étant un fournisseur clé.
- Prix des denrées et fonctionnement des marchés : En lien a ce qui précède, tenant compte des faibles disponibilités des céréales attendus dans les prochains mois, et de l’augmentation continue du cout de carburant, on pourrait s’attendre à la poursuite de la volatilité actuelle des prix des denrées notamment les céréales comme le blé, la farine de maïs et le riz importé du fait de la rupture probable des approvisionnements en provenance des pays producteurs en crise.
- Situation COVID-19 et restrictions : le manque d’observance des mesures barrières contre la propagation de la COVID-19, pourrait occasionner la survenue d’une nouvelle vague de cette pandémie. Cette situation, pourrait conduire aux durcissements des mesures préjudiciables à certains moyens de subsistance.
La fin de la période de mars- à juin 2022 devra coïncider avec les récoltes des vivriers pour la saison B alors que celle de septembre constitue la période de semis au Nord-est et Centre-est du pays. Une proportion importante de ménages déplacés ne pourrait participer à cette deuxième saison agricole, la surface emblavée pour les producteurs agricoles pourrait éventuellement diminuer. Cela pourrait également faire baisser les récoltes et ainsi diminuer les disponibilités locales dans un contexte mondial marqué par la hausse des prix des principales denrées alimentaires. Ainsi donc, la situation dans cette région ne pourra s’améliorer.
La situation de la sécurité alimentaire au Centre-est, à Nord-est serait marquée par les zones de Crise (Phase 3 de l'IPC), notamment dans le Sud Kivu, le Nord-Kivu et l'Ituri jusqu'en septembre 2022. La plupart de la centre-nord du pays reste en Minimale (Phase 1 de l’IPC), avec des zones de Stress (Phase 2 de l’IPC) dans le sud-est et partis de l’est. On estime aussi que la période de soudure s’annoncerait plus précoce déjà à partir du début d’août-2022.
Source : FEWS NET
Source : FEWS NET based on Index Mundi data
Cette mise à jour des perspectives sur la sécurité alimentaire présente une analyse des conditions actuelles d'insécurité alimentaire aiguë et de toute évolution de la dernière projection de FEWS NET concernant les résultats de l'insécurité alimentaire aiguë dans la géographie spécifiée au cours des six prochains mois. Pour en savoir plus sur le travail, cliquez ici.