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La Guinée, le Liberia et la Sierra Leone sont des pays suivis à distance par FEWS NET. Dans le cadre du suivi à distance, un coordinateur travaille habituellement à partir d’un bureau régional à proximité. En s’appuyant sur des partenaires pour les données, le coordinateur a recours à l’élaboration de scénarios pour effectuer des analyses et produire des rapports. S’il y a peu de données disponibles, il va de soi que les rapports du suivi à distance seront moins détaillés que ceux des pays dans lesquels FEWS NET possède des bureaux. L’analyse présentée dans ce rapport est basée sur un certain nombre d’informations fournies par des partenaires locaux, tels que des organisations de commerçants, le PAM et OCHA. FEWS NET participe également à un groupe de travail informel pour échanger des informations et discuter des analyses relatives aux impacts potentiels de l’épidémie d’Ébola sur la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest.
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Le nombre de cas d’Ébola au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée continue d’augmenter. Cependant, d’après les informations disponibles actuellement, les projections précédentes d’une augmentation exponentielle des cas d’Ébola dans les mois à venir semblent de moins en moins probables. Par conséquent, FEWS NET a actualisé ses analyses en utilisant un scénario avec une augmentation plus faible mais toujours importante du nombre de cas d’Ébola à la fin janvier 2015.
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Les ménages dont des membres sont atteints d’Ébola devront faire face à des récoltes et des revenus inférieurs à la moyenne, ainsi qu’à un accès physique difficile aux denrées alimentaires en raison des quarantaines an niveau des ménages et du stigmate social. Entre novembre 2014 et mars 2015, les ménages directement affectés ne recevant pas d’aide humanitaire devront probablement faire face à une insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC).
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Pour les ménages pauvres dépendants des marchés dans les zones les plus touchées par Ébola, des revenus inférieurs à la moyenne et les perturbations des marchés ont réduit le pouvoir d’achat des ménages de manière atypique. À l’heure actuelle, ces ménages sont en situation de Stress (Phase 2 de l’IPC), mais ils passeront probablement à une situation de Crise (Phase 3 de l’IPC) entre janvier et mars 2015. Dans les zones comportant moins de cas d’Ébola, les ménages dépendants des marchés resteront probablement en situation de Stress (Phase 2 de l’IPC) au cours de cette période.
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En raison des récoltes rizicoles en cours, les ménages producteurs répondront à la majorité de leurs besoins en denrées alimentaires de base grâce à leur propre production à court terme, et seront confrontés à une insécurité alimentaire Minimale (Phase 1 de l’IPC) jusqu’à la fin décembre. Pour autant, les revenus inférieurs à la moyenne provenant des ventes de cultures limiteront probablement les dépenses pour les besoins non alimentaires essentiels et contribueront à une insécurité alimentaire de Stress (Phase 2 de l’IPC) entre janvier et mars 2015, notamment au moment où les stocks alimentaires des ménages commenceront à s’épuiser.
Nombre de cas d’Ébola
Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), à la date du 23 novembre 2014, il y avait un total de 15.901 cas d’Ébola confirmés, probables et suspectés en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone. Les régions dans chaque pays qui ont le nombre le plus élevé de cas récents incluent N’Zerekore et Macenta en Guinée, Monrovia au Liberia, et Freetown, Port Loko, la Zone rurale de l’ouest et Bombali en Sierra Leone. Parallèlement, plusieurs zones qui avaient un nombre élevé de cas au début de l’épidémie, comme par exemple le comté de Lofa au Liberia et les districts de Kenama et de Kailahun en Sierra Leone, ont enregistré moins de cas, voire aucun. Parmi les trois pays les plus touchés par Ébola, seule la Sierra Leone a toujours un nombre croissant de nouveaux cas. Dans les deux autres pays, les nombres de cas hebdomadaires se sont stabilisés ou ont baissé.
Production agricole
La principale récolte rizicole est toujours en cours dans toute la région. D’après les signalements, les niveaux de la production agricole sont moyens, en général, avec des récoltes légèrement en dessous de la moyenne dans les zones les plus touchées par l’épidémie. Ces baisses de production ont été liées en général à la disponibilité réduite de la main d’œuvre dans la mesure où les groupes communautaires qui cultivent normalement ensemble ont été moins actifs que d’habitude en cette période. Selon les agriculteurs dans les zones les plus touchées par Ébola, il s’en suivra probablement une baisse légère à modérée des rendements agricoles cette années.
Les récoltes de manioc, une plante exigeant en général moins de travail intensif, sont moins affectées par les problèmes de main d’œuvre, comparé au riz, d’après les rapports. Même si une évaluation rapide récente, menée au Liberia à la fin de septembre et au début d’octobre par le FAO/PAM/Gouvernements/Partenaires, concluait que les cultivateurs s’attendaient à des récoltes de manioc inférieures à la moyenne dans certaines zones, les baisses de production ont été attribuées en général à des causes indépendantes de l’Ébola, telles que des inondations ou un nombre moindre d’agriculteurs cultivant le manioc cette année.
Pour ce qui est du cacao, une étude, effectuée en novembre 2014 en Sierra Leone par Welthungerhilfe, concluait que les questions de disponibilité de main d’œuvre n’avait pas limité la production de manière significative et que les acteurs dans ce secteur prévoyaient que la production de cette année serait supérieure aux années passées.
Revenus des ménages
Les craintes liées à l’épidémie d’Ébola ont contribué à un ralentissement économique important en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone, avec pour conséquence des revenus inférieurs à la moyenne pour de nombreux ménages. D’après une enquête récente menée par la Banque mondiale, Gallup et le Liberia Institute of Statistics, environ la moitié des répondants des zones urbaines et un tiers des répondants ruraux au Liberia, qui avaient travaillé plus tôt dans l’année pendant l’Enquête sur les revenus et les dépenses des ménages HIES) en 2014, signalaient qu’ils n’avaient plus de travail en octobre et novembre 2014. Cette enquête concluait également qu’il n’y avait pas de différences importantes, statistiquement parlant, dans les taux de chômage entre les régions les plus affectées par Ébola et les autres régions du pays.
Les conclusions de cette étude sont pratiquement identiques à celles d’autres rapports de partenaires et d’informateurs clés en Sierra Leone et en Guinée indiquant que l’épidémie d’Ébola avait eu un impact négatif sur de nombreux secteurs de l’économie et sur les sources de revenus des ménages. Par ailleurs, les ménages agricoles dans ces trois pays ont plus de difficultés que d’habitude pour commercialiser leurs cultures de denrées de base et de rente en raison des perturbations des marchés, des fermetures de frontières et de la diminution de la demande, d’après les rapports. Des revenus anormalement faibles ont probablement un effet négatif sur l’accès alimentaires des ménages pauvres et dépendants des marchés dans les trois pays.
Marchés
Même si quelques rapports signalaient que des marchés fermés précédemment avaient rouvert, les craintes liées à Ébola continuent à perturber le fonctionnement normal des marchés dans l’ensemble des trois pays. Par exemple, le International Growth Centre signale dans son enquête la plus récente, menée à la fin de septembre et au début d’octobre, qu’il avait conclu à une baisse du nombre de commerçants dans les zones en quarantaine de la Sierra Leone, par rapport aux mois précédents et aux niveaux de 2012. En comparaison, le nombre de commerçants avait augmenté en octobre de leur année de référence (2012) par rapport à août et septembre, au moment où le début des récoltes de la saison principale augmente les possibilités du commerce. Une évaluation rapide récente au Liberia a également conclu que les commerçants interrogés signalaient une baisse du nombre de clients, de commerçants, de camions et de niveaux des stocks alimentaires par rapport à l’année dernière sur la plupart des marchés, à l’exception du sud-est du Liberia où l’épidémie d’Ébola a été moins grave.
En raison de l’épidémie, beaucoup de restrictions officielles sur les mouvements de la population avaient été mises en place dans l’ensemble de la région. Pour ce qui est des blocages routiers actuels en Sierra Leone et au Liberia, des rapports d’informateurs clés de FEWS NET en date du 27 novembre, ainsi que des informations récentes provenant d’organisations partenaires, indiquent que les produits alimentaire agricoles sont autorisés à passer. En outre, il n’y a pas de rapports récents sur les restrictions officielles des mouvements internes en Guinée.
À la mi-novembre, FEWS NET a effectué une première série de collecte de données pour une enquête sur les commerçants par SMS en Sierra Leone et au Liberia. Même si une analyse supplémentaire est nécessaire, les résultats préliminaires suggèrent qu’environ la moitié des répondants en Sierra Leone et un peu plus de la moitié au Liberia signalaient que les marchés hebdomadaires et quotidiens étaient ouverts et fonctionnaient normalement. Parmi l’autre moitié, la majorité indiquait que les marchés étaient ouverts et fonctionnaient à capacité réduite, tandis qu’un petit nombre précisait que les marchés locaux étaient fermés. Par ailleurs, un peu plus de la moitié des commerçants rapportaient qu’ils pensaient que la disponibilité alimentaire dans les zones où ils travaillaient était suffisante actuellement pour satisfaire aux besoins des consommateurs locaux, avec un pourcentage légèrement plus élevé de commerçants libériens répondant positivement à cette question, comparé aux commerçants en Sierra Leone.
Les tendances des prix au cours du mois dernier ont varié en fonction des tendances normales à cette période dans la plupart des zones, mais avec quelques augmentations atypiques des prix observées sur certains marchés. Plus précisément, en Guinée et en Sierra Leone, les prix des denrées alimentaires de base (riz local et importé, maïs) étaient en général stables ou en baisse (de moins de 10 pour cent) entre septembre et octobre, ce qui est normal pour la saison étant donné les récoltes en cours. Cependant, des augmentations de prix pour le riz importé, allant de 5 à 7 pour cent, ont été observées sur des marchés à Freetown, Moyamba et Tonkolili en Sierra Leone. Dans l’ensemble du Liberia parallèlement, les prix du riz importé étaient stables ou avaient augmenté de moins de 10 percent. Ces augmentations de prix ont sans doute un rapport avec les perturbations sur les marchés nationaux et l’effet différé de la dépréciation du dollar du Liberia en juin et juillet de cette année, qui a augmenté le coût des produits importés.
Les récentes estimations des nombres de cas pour les trois pays affectés par Ébola indiquent qu’une augmentation exponentielle de cas dans les mois à venir n’est plus probable aujourd’hui. En se basant sur les estimations disponibles actuellement, FEWS NET a actualisé ses chiffres de planification de 40.000 à 100.000 cas cumulés d’Ébola en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone à la fin de janvier 2015. Même si ces nouveaux chiffres de planification n’affecteront pas la majorité des hypothèses utilisées par FEWS NET pour établir son scénario pour la période d’octobre 2014 à mars 2015, l’hypothèse suivante a été mise à jour :
- Marchés : Les importations de riz des marchés internationaux se poursuivront sans doute à des volumes relativement normaux grâce aux ports qui continuent à fonctionner. Pour autant, les craintes liées à Ébola et les restrictions officielles imposées aux mouvements continueront à diminuer les flux commerciaux entre les marchés ruraux et urbains, donnant lieu à des perturbations modérées dans l’approvisionnement et des déficits alimentaires localisés sur certains marchés. Par ailleurs, les fermetures de points de passage frontaliers et de quelques marchés, en particulier dans les zones les plus affectées par l’épidémie, devraient rester en place. Les prix alimentaires devraient être fluctuants.
Une description des autres hypothèses élaborées pour ce scénario figure dans l’Alerte du 10 octobre de FEWS NET.
Compte tenu de l’actualisation de ces hypothèses, des niveaux élevés d’insécurité alimentaire sont toujours prévus dans les trois pays pour les ménages directement ou indirectement affectés par l’épidémie d’Ébola. Concernant les ménages dont des membres sont atteints par la maladie à virus Ébola, la perte de membres productifs dans la famille contribuera à des récoltes et des revenus inférieurs à la moyenne. Ce phénomène, auquel s’ajoute l’accès physique difficile aux produits alimentaires en raison des quarantaines au niveau des ménages et du stigmate social, limitera de manière significative la disponibilité et l’accès alimentaires. Pour les ménages qui ne reçoivent pas d’aide humanitaire, des écarts de consommation faibles à modérés et une détérioration soutenue de la qualité nutritionnelle des régimes alimentaires des ménages, équivalent à une insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC), est probable à dater de ce jour jusqu’en mars 2015. De même, pour les ménages pauvres dépendants des marchés dans les zones les plus affectées par l’épidémie, les perturbations des marchés et une détérioration significative du pouvoir d’achat des ménages limiteront l’accès alimentaire. Ces ménages devraient être confrontés à des résultats de Stress (Phase 2 de l’IPC) en novembre et décembre, puis devraient passer ensuite à une insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC) à partir de mars 2015.
Comme lors d’une année normale, les ménages agricoles pauvres compteront sur leur propre production de denrées alimentaires de base à court terme. Cependant, une fois que ces stocks seront épuisés, à un moment donné au cours du premier trimestre 2015, ces ménages dépendront de plus en plus des marchés locaux pour leur accès alimentaire. Cependant, compte tenu des perturbations des marchés et de la diminution des revenus provenant des ventes de cultures et du travail de main d’œuvre, le pouvoir d’achat des ménages sera limité. Ces populations font face actuellement à une insécurité alimentaire aiguë Minimale (Phase 1 de l’IPC), bien qu’ils puissent passer à une insécurité alimentaire de Stress Phase 2 de l’IPC) entre janvier et mars 2015.
Au début de novembre 2014, FEWS NET a mené une analyse des résultats d’une Approche de l’économie des ménages (HEA) en utilisant l’année de consommation 2005-06 pour une partie du comté de Bomi, Liberia, appelée autrefois la Zone des moyens d’existence de manioc et de charbon1. Cette analyse avait pour objectif de mieux comprendre les implications possibles sur la sécurité alimentaire d’une augmentation exponentielle du nombre de cas d’Ébola dans une zone rurale de moyens d’existence affectée par Ébola dans la région. Une description détaillée de l’analyse figure dans le Rapport spécial de FEWS NET du 3 novembre.
Compte tenu de la mise à jour des chiffres de planification concernant le nombre de cas d’Ébola et des nouvelles informations fournies par des évaluations récentes au Liberia, FEWS NET a revu son analyse AEM pour le comté de Bomi et a apporté quelques modifications aux hypothèses suivantes :
- Les revenus provenant des travaux agricoles, les travaux rémunérés en nature et les repas servis pendant les travaux agricoles baisseront de 35 à 75 pour cent par rapport à l’année de référence.
- Les revenus provenant du travail indépendant et de la vente de cultures baisseront de 30 à 75 pour cent par rapport à l’année de référence en raison d’un ralentissement économique général, de la baisse du pouvoir d’achat et de la demande, des perturbations du marché et des difficultés à transporter les produits entre les zones. Les ventes de charbon diminueront également de 85 pour cent par rapport à l’année de référence.
Les conséquences de l’actualisation de l’analyse des résultats pour la Zone des moyens d’existence de charbon et de manioc du comté de Boni indiquent que les perturbations liées à Ébola sur les marchés, le commerce et les moyens d’existence pourraient entraîner une baisse du revenu annuel total de ménages (aliments plus espèces) à titre de pourcentage des besoins alimentaires minimum pour les ménages dans tous les groupes socioéconomiques. Pour autant, l’augmentation de la consommation de manioc et des produits alimentaires de cueillette (ignames de brousse et huile de palme) pourrait être suffisante pour permettre aux ménages pauvres (33-50 pour cent des ménages), aux ménages à revenu moyen (25-35 pour cent des ménages) et aux ménages aisés (10-20 pour cent des ménages) de couvrir au moins à un niveau minimum leurs besoins alimentaires et non alimentaires pendant un an.
Parallèlement, pour les ménages très pauvres (10-15 pour cent des ménages), l’analyse de l’alimentation et des revenus annuels suggère qu’ils pourront générer suffisamment de revenus au cours de l’année prochaine pour satisfaire à leurs besoins alimentaires annuels minimum, même s’ils ne pourront probablement pas se permettre les dépenses essentielles pour protéger leurs moyens d’existence (soit un déficit de protection des moyens d’existence) pendant toute l’année. Par ailleurs, puisque certaines sources alimentaires et de revenus ne sont disponibles qu’à des moments précis de l’année et que les ménages n’arriveront pas complètement à répartir également leur consommation, des petits écarts de consommation alimentaire (soit des déficits de survie) sont possibles en juin avant que les ignames sauvages ne deviennent de plus en plus disponibles. Ce point suggère que les ménages très pauvres seront confronté au moins à une insécurité alimentaire de Stress (Phase 2 de l’IPC) pendant le reste de l’année de consommation 2014/15 (ou jusqu’à la fin septembre 2015), avec une possibilité de Crise (Phase 3 de l’IPC) en juin 2015.
L’analyse du cycle saisonnier suggère aussi qu’en raison d’une incapacité à répartir également leur consommation sur toute l’année, les ménages pauvres pourraient également faire face à des déficits de protection des moyens d’existence, équivalent en gros à une situation de Stress (Phase 2 de l’IPC) en juin 2015, malgré le fait de générer un revenu annuel suffisant permettant théoriquement de couvrir les besoins alimentaires et non alimentaires minimum pour toute l’année.
1Une activité de zonage « plus » des moyens d’existence menée en 2011 a reclassé cette zone sous l’appellation Zone des moyens d’existence « de caoutchouc et de charbon avec des cultures alimentaires ».
Source : OMS
Source : FAO/PAM/Gouvernements/Partenaires (Résultats préliminaires de l’évaluation rapi…
Source : FAO/PAM/Gouvernements/Partenaires (Résultats préliminaires de l’évaluation rapi…
Source : FEWS NET
Source : FEWS NET